« Dans un monde incertain, comment faire évoluer votre S&OP », tel était le thème de la table ronde organisée sur le plateau de Supply Chain Village et à laquelle Guillaume Destouches, Associé de DIAGMA, en charge du pilier S&OP et Planification des flux a participé le 12 octobre dernier. L’occasion de rappeler quelques fondamentaux du processus de Sales & Operations Planning, mais aussi d’évoquer ses évolutions (IBP, APS, IA …). Pour Guillaume Destouches, dans un contexte de pénurie et de sobriété, le S&OP vise à maximiser la marge non seulement en cherchant un équilibre charge/ capacité, mais aussi en réorientant la demande vers les produits et les marchés les plus contributeurs, dans les ressources et les capacités disponibles.
REPLAY TABLE RONDE EVOLUTION DU S&OP EN ENVIRONNEMENT INCERTAIN
A quoi sert le S&OP ?
Pour définir la finalité du S&OP (Sales & Operations Planning), Guillaume Destouches s’appuie sur une métaphore. « J’aime bien l’image du routeur quand on fait le Vendée Globe. On connaît les prévisions météo, on sait où on veut aller. Mais on ne connaît pas forcément la route par laquelle on veut passer. Et on est tous dans le même bateau. Pour moi, le S&OP c’est vraiment le principe de l’équipe qui a un objectif et qui va définir sa route pour y arriver« . Pour l’Associé de DIAGMA, le processus S&OP vise à mettre en place la stratégie Business de l’entreprise en l’accompagnant pas à pas. Il vise aussi à maximiser sa marge.
S’appuyer sur des données fiables
« Ce qui est intéressant aussi, c’est de considérer à quel niveau le S&OP est fait : par BU, par pays … Souvent il y a discussion sur qui est invité aux réunions S&OP pour ne pas être 15 autour de la table », souligne Guillaume Destouches. Il estime en effet important de définir qui participe aux réunions S&OP en fonction des environnements dans lesquels on travaille. Et de poursuivre sur les fondamentaux : « Les données doivent aussi être fiables pour factualiser les scénarios. Il n’y a rien de pire dans une réunion S&OP que d’être 15 personnes autour de la table à ne pas être d’accord sur les chiffres. Les outils aident à avoir une baseline robuste pour construire les scénarios ».
Le S&OP évolue vers un pilotage de la demande
« Dans le contexte actuel de pénurie et de sobriété, la réflexion a évolué. Les questions qui se posent sont plutôt : est-ce que je dois réduire mon panel de produits ? Quels sont mes choix en matières d’approvisionnements ? Que faire au niveau de l’allocation de mes ressources ?« , observe Guillaume Destouches. Et d’ajouter : » Souvent le S&OP est pris au niveau des opérations. A présent, il remonte de plus en plus au niveau de la demande. Le but est de voir comment l’influencer pour maximiser la marge, prioriser des clients ou des marchés … Par exemple, si je supprime cette famille, en quoi vais-je libérer des ressources pour mieux servir mes produits cœur ? Les outils de simulations permettent de répondre à ces questions, ce qui est plus compliqué à faire sur des fichiers Excel« , estime Guillaume Destouches.
Gagner en maturité en raisonnant plus contribution
« Il faut être conscient de sa maturité de départ (baseline construite). Certains veulent mettre en place un S&OP sans avoir un niveau de pilotage de flux suffisant. Attention à ne pas griller les étapes », prévient l’Associé de DIAGMA. « D’abord une baseline robuste, ensuite la construction de scénarios« , recommande-t-il.
Une prise de conscience via de la formation et des jeux de simulation est efficace pour gagner en maturité. « On aime bien organiser une formation de type jeu quelle que soit la taille de l’entreprise. Si on ne met pas des commerciaux en binôme avec des planificateurs pour construire un plan au travers du jeu, ils ne comprennent pas l’esprit global. C’est en effet de se projeter dans un EBITDA plus positif et de raisonner en contribution et pas uniquement en charge / capacité. Ce qui rejoint l’action sur la demande : que dois-je arrêter de vendre ? Sur quoi dois-je mettre le paquet parce que c’est aligné sur les ressources dont je dispose ? »
Renfort de la fonction finance avec l’IBP
Qu’apporte l’Integrated Business Planning (IBP) par rapport au S&OP ? Certaines entreprises utilisent leur APS (Advanced Planning System) et la collaboration inter-fonctions pour élaborer leur Budget en valorisant les données quantitatives issues du S&OP. Ce qui leur permet d’avoir un plan unique pour toute l’entreprise. « Pour certains, l’IBP est la valorisation financière du S&OP. Pour d’autres, le S&OP vient plutôt des opérations, et l’IBP de la finance. Mais les deux se rejoignent », lance Guillaume Destouches. Avant d’expliciter : « Les Opérations utilisaient le S&OP pour expliquer à la Direction ce dont ils avaient besoin. Maintenant, quand on dit que le DG doit porter le S&OP, on souligne l’entrée du monde financier dans le processus. L’IBP vient plus d’une culture financière où je veux améliorer la performance de l’entreprise, décider de quel CAPEX je mets et vérifier quand je prends des décisions, qu’on va atteindre les résultats escomptés« .
Une valorisation au-delà du Prix de revient industriel
Pour Guillaume Destouches, dans la valorisation, plus que l’approche Prix de revient Industriel (PRI) pour définir la marge, ce sont les arbitrages qui importent. « Quand je prends un volume, il faut considérer s’il va être contributeur de marge et jusqu’où. Voire même, s’il ne va pas me pénaliser en prenant la capacité de fabrication d’un produit plus contributeur. Ce sont ces échanges qui sont importants, plus que les approches PRI stricto sensu« .
Adapter le processus S&OP à chaque métier
S’il existe de bonnes pratiques en matière de S&OP (5 étapes, respect du workflow), cela n’implique pas que ce processus soit standard. Au contraire, il doit s’adapter aux contraintes métier de chaque entreprise. « Dans la cosmétique, l’enjeu du S&OP est plutôt la vitesse d’introduction des produits. Tandis que dans le pneu, c’est le prix de revient qui est clef. En gestion à l’affaire, la question est de définir les composants à acheter aujourd’hui compte-tenu de la crise pour fabriquer mes machines à terme en estimant les risques financiers encourus », illustre Guillaume Destouches. « D’un environnement à l’autre, les projets S&OP ne sont pas du tout les mêmes ».
Quels apports de l’IA au processus S&OP ?
L’intelligence artificielle pourrait-elle faire progresser le processus S&OP ? « Nous croyons beaucoup à l’IA pour identifier les signaux faibles et les exploiter. Mais aussi pour corriger en automatique les données manquantes en les remplaçant par des données avoisinantes« , expose Guillaume Destouches. D’autres apports de l’IA pourraient porter sur l’identification de profils de lancement de nouveaux produits ou de promotions au niveau des prévisions. L’IA pourrait aussi suggérer des orientations ou compléter des scénarios en analysant leurs conséquences. Enfin, elle pourrait aussi faire des analyses d’élasticité de prix , voire automatiser le processus S&OP pour pallier des pénuries de ressources humaines … Ce processus n’a donc pas fini d’évoluer !
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